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  • Photo du rédacteurVincent

Parfum de scandale pédophile au musée Thyssen

Dernière mise à jour : 29 déc. 2023


Fin 2017, une lettre signée par douze mille New-yorkais demande à la direction du Metropolitan Museum of Art de décrocher un tableau de Balthus (Balthasar Klossowski de Rola, 1908-2001) peint à la veille de la Seconde Guerre mondiale : Thérèse rêvant. Les plaignants font allusion au "caractère pédophile implicite" de la peinture, un portrait de jeune fille assise, les yeux fermés et les cuisses ouvertes de sorte qu'elles laissent voir sa culotte. Thérèse rêvant fait partie des quarante-sept œuvres de la belle rétrospective que le Thyssen consacre au peintre français. Jusqu'au 26 mai.

Museo Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid

Avant guerre, alors que les surréalistes dominent Paris de leur culte à Sade, à Freud et au pouvoir libérateur du rêve, Balthus usera de la provocation érotique pour éveiller une société trop conventionnelle et conformiste à son goût.

La sélection des commissaires Raphaël Bouvier et Juan Ángel López-Manzanares plonge les visiteurs dans la quintessence du travail d'un des grands maitres du 20° siècle, un des artistes les plus singuliers de son temps, et l'auteur d'une œuvre ambiguë et déroutante, admirée et rejetée, rare et toujours à contre-courant des avant-gardes.

Fils de peintres, Balthus est un autodidacte qui a tout appris des conseils de Pierre Bonnard, ami de la famille, et en fréquentant les maitres de la Renaissance, Piero della Francesca et Caravaggio, mais aussi Poussin, Géricault et Courbet. Dans cette indifférence à la modernité, ce "postmoderne" a développé un style figuratif personnel unique, loin de toute possibilité d'étiquetage. On y croise aussi son admiration pour l'art oriental et pour les objets artistiques populaires comme les illustrés pour enfants.


Thérèse rêvant, 1938, huile sur toile, 150 x 130 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York

La partie de cartes, 1948-1950, huile sur toile, 140 x 194 cm, Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid

La chambre turque, 1965-1966, huile sur toile, 130x162 cm, Centre Pompidou, Paris

Balthus a réussi la synthèse des techniques des maitres antiques, avec quelques échappées vers le surréalisme. Ses images incarnent de nombreuses contradictions, elles mêlent la sérénité à de fortes tensions, le rêve et le mystère au réel, un certain érotisme à une idée de l'innocence. Dans ses scènes urbaines et ses intérieurs, ses paysages et ses natures mortes, Balthus introduit une dimension scénique et invite le spectateur à entrer, où toujours, le temps semble s'être arrêté, autour de personnages littéralement pétrifiés.

“On parle d'art ou on parle d'autre chose ?" La question est posée par Setsuko Klossowska, la veuve de Balthus, lors de la présentation de l'exposition. Setsuko parlait du scandale new yorkais. "Si on parle de sujets éloignés du domaine de l'art, il me semble normal que des gens aient des valeurs différentes, bien que je me soucie peu de ce qu'ils disent. Mais il est dommage qu'une polémique détourne l'attention due à la création artistique. Tout ça, comme on dit dans Macbeth, c'est une histoire racontée par un idiot."

Museo Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid

Jusqu'au 26 mai

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