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  • Photo du rédacteurVincent

Zuloaga à Paris, symbolisme ou espagnolade ?

Dernière mise à jour : 29 déc. 2023

À la Fondation Mapfre, nous avons fait la connaissance du peintre Ignacio Zuloaga (Éibar, 1870-Madrid, 1945), à l'occasion d'une exposition qui croise l'artiste dans le Paris de 1900. Une vision de ce peintre peu connue en Espagne, où on le lie plutôt à la légende noire (la "España negra") : tout ce que la société espagnole refoule dans le champ de l'inavouable, de l'Inquisition aux crimes du franquisme. On connait aussi Zuloaga pour avoir chroniqué la tauromachie, qui remplit un cinquième de ses toiles. Un peintre à la réputation rance que cette brillante exposition révèle dans sa lumière.

Zuloaga en el París de la Belle Époque

Fondation Mapfre, Madrid ::: jusqu'au 7 janvier

L'histoire que nous propose cette nouvelle lecture de l'œuvre de Zuloaga le fait sortir du cadre traditionnel pour une vision pleinement moderne, liée à son long séjour parisien, et au contexte du Symbolisme dans lequel il évolue à l'époque. Les commissaires Pablo Jiménez Burillo et Leyre Bozal ont confronté la production de Zuloaga à celle de ses contemporains Gauguin, Picasso, Rodin, entre autres. Plus de 90 œuvres, dont une quarantaine prêtées par des collections particulières et par le Museum of Fine Arts de Boston, le Musée d’Orsay (Paris), le Musée Picasso (Paris), le Musée Rodin (Paris), le Museo de Bellas Artes de Bilbao, notamment.


En 1889, âgé de 19 ans, Ignacio Zuloaga débarque à Paris, capitale mondiale de l'art moderne. La ville est en pleine ébullition, c'est le lieu des tendances nouvelles, des expérimentations picturales qui fonderont la modernité. Le peintre rencontre Gauguin, Toulouse-Lautrec, Degas; il expose ses travaux dans les galeries en vue. C'est dans la ville lumière que Zuloaga va briller à son tour, empruntant le chemin des artistes au top du moment.

Formé dans les ateliers les plus prisés, il s'initie à la peinture de plein air, héritière de l'Impressionnisme, il rencontre Jacques-Émile Blanche et Toulouse-Lautrec. Il expose avec Édouard Vuillard, Pierre Bonnard et Paul Sérusier, parmi d'autres figures du Symbolisme. Zuloaga vouera une profonde amitié au peintre Émile Bernard, avec qui il partage une admiration pour les maîtres du passé, et à Auguste Rodin, dont il est un inconditionnel. Il entre en contact avec Gauguin, tente la simplification des formes, tout en restant dans une palette assez sombre. Rilke et Rodin le considèrent comme une référence pour l'art moderne. Jusqu'en 1914, la Grande Guerre rebattant (toutes) les cartes, il va laisser progressivement le brumeux folklore espagnol pour faire peinture. Et il va le faire magistralement, prouvant au passage un grand talent pour capter la psychologie de ses modèles dans des portraits et des scènes de groupes, ce qui lui permettra de nouer des liens avec l'élite sociale et intellectuelle parisienne et de tenir un rôle important parmi les peoples de la Belle Époque.



L'expérience parisienne de Zuloaga est fondamentale pour comprendre son œuvre. Ses peintures, à mi-chemin entre les cultures française et espagnole, sortent des limites établies par l'histoire de l'art, qui l'associe à l'Espagne de la tragédie, de l'enfoui, de l'indicible. Zuloaga a peint les nains, les proxénètes, les mendiants, les paysans, les religieuses en mantilles, perpétuant l'image d'une Espagne à la traîne de l'Europe. Il a opté pour le traditionalisme, côté personnel et pour un soutien au franquisme, côté politique. Face à cette casserole, qui est chargée et qui fait partie du legs Zuloaga, la Fondation Mapfre présente un artiste de culture métissée, qui a changé de registres, qui a voyagé et a été ami de la crème artistique et intellectuelle parisienne. Zuloaga ne s'est pas embourbé dans la lourdeur des traditions; il ne s'est pas plus perdu dans la frénésie d'un Européen moderne...

Jusqu'au 7 janvier

Paseo de Recoletos 23, Madrid

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