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La galerie des Vilain.e.s #1

Dernière mise à jour : 20 mars 2020


Zola en a fait son tube (les Rougon-Maquart). Umberto Eco leur a consacré une encyclopédie, au même titre qu'à la beauté. Baudelaire disait faire "de l'or avec de la boue". Les moches, c'est un sujet. Le physique banal en est un autre, c'est de ça qu'il est question dans cette petite chronique potache : la laideur ordinaire a sa place au musée.

Les traits grossiers, les faces asymétriques, les sourires dissonants, lâches ou mesquins se partagent, à travers le monde, l'histoire et les classes sociales, dans une saine et vertueuse égalité. On ne vous parle pas ici de monstres, de démons, de morts-vivants sortis des fantasmes de peintres de génie, entre abysses répugnants et difformités qui frôlent le sublime. En nous promenant dans les galeries de portraits des grands musées, on s'est amusés, un peu puérilement, des "gueules", des bouches en culs-de-poules, de la morgue et, parfois, il faut bien le dire, des visages franchement disgracieux de certaines têtes couronnées, de grands d'Espagne, de princes de l'Église, d'ambassadeurs ou de riches marchand vénitiens.

On ne se moque pas du physique. On est d'accord... Ici, c'est la suffisance qui est pointée. Et, assumons-le, un peu de mesquinerie est lâchée... De toute façon, tous ces gens sont morts depuis longtemps.

Notre premier voyage parmi les moches, nous l'avons fait à la fabuleuse Real Academia de Bellas Artes San Fernando, ce "petit" musée madrilène qu'on adore, notamment parce qu'il nous évite d'aller au Prado par le fait de proposer aussi des Goya, des Rubens, un Arcimboldo, etc. Moins, mais quand même. Et une belle section d'art moderne.

Pompeo Batoni, Don Manuel de Roda y Arietta (1765)

Celui qui inaugure notre galerie s'appelle Don Manuel de Roda (1708-1792). C'est un grand commis de la monarchie et il dégage un ennui abyssal... En 1758, il s’installe à Rome, nommé agent de prières par Fernand VI. Et, en 1760, Charles III le nomme ambassadeur au Saint-Siège. Roda reviendra à la Cour en 1765, comme secrétaire à la Justice.

Avant de rentrer en Espagne, il se fait faire le portrait par Batoni. Sur la table, il a fait représenter les deux lettres qui lui confient sa nouvelle charge, qu’il portera jusqu’à sa mort, prenant une part active dans l’expulsion de la Compagnie de Jésus en 1767.

Avec une technique parfaite, une grande acuité d’observation, une variété de ressources et une palette lumineuse, Batoni fut durant quarante ans le portraitiste sans rival de la Rome diocésaine, cultivant en plus la peinture religieuse et la mythologie. Il a peint des papes, des princes de l’Église et des générations de voyageurs du Grand Tour.

Mariano Salvador Maella, Portrait de Don Juan Sixto Garcia de la Prada (vers 1798,)

La photo est épouvantable, malgré les corrections, mais le bonhomme nous a fait craquer ! Garcia de la Prada jouait un rôle important dans le commerce et la banque, ministre de la Real Junta du Commerce, de la monnaie et des mines. Peu avant sa mort, il a chargé Maella de faire ce portrait avec le sceau de la famille comme garant de son niveau dans l’échelle sociale.

Il s’agit d’une œuvre magnifique de Mariano Salvador Maella, qui reflète sa maîtrise dans le domaine du dessin. Mariano Salvador Maella est né à Valencia en 1739 ; il suivra une formation en peinture à l’Académie royale des Beaux-Arts de San Fernando à Madrid, dont il deviendra directeur (1795-1798).

Un style essentiellement académique, en accord avec les goûts de l’époque, au dessin précis, aux couleurs froides et aux finitions douces.

En 1799, il est nommé premier peintre de la cour. On lui doit surtout des fresques, réalisées pour les palais d’El Escorial, d’Aranjuez et de La Granja ainsi que pour les cathédrales de Burgo de Osma (Soria) et de Tolède.

Vicente Lopéz Portaña, Retrato de la reina María Isabel de Borbón (1829)

Marie Isabelle d'Espagne (1789-1848) était la fille du roi Charles IV d'Espagne et de la reine Marie Louise de Bourbon-Parme. Elle sera reine consorte du Royaume des Deux-Sicile par son mariage, alors qu'elle est âgée de 13 ans, avec François I des Deux-Sicile.

Une rumeur dit que Marie-Isabelle aurait pu être la fille de Manuel Godoy, un courtisan, et dans ses accès d'humeurs sa belle-mère, la reine Marie-Caroline, la traitait de "bâtarde épileptique engendrée par le crime et la scélératesse".

La jeune femme mena une vie légère qui choqua ses enfants. Veuve, elle tentera d'imposer la régence mais le complot sera découvert. Reine-mère, elle s'éprend d'un officier autrichien qui exigera le titre d'Altesse Royale : Marie-Isabelle, outrée, demandera à son fils de roi de le faire expulser du royaume.

Elle mourut en 1848 et fut inhumée en la basilique Santa Chiara de Naples, nécropole des rois des Deux-Siciles.

Fernando Álvarez de Sotomayor, Portrait de Ana de Osma y Zabala, comtesse de Casa Valencia (1929)

On ne sait rien de celle-ci, à part son nom et son titre.

Le peintre, Fernando Álvarez de Sotomayor, est plus connu. Artiste important dans les cercles de l'art académique espagnol de la première moitié du 20° siècle, il a dirigé le Prado, et fut membre de l'Académie royale des Beaux-Arts de San Fernando de Madrid.

Il a aussi une petite réputation au Chili, où il a vécu quelques années, à la direction de l'École des Beaux-Arts de Santiago.

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