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Sur la route de Guernica. Histoire d'une icône culturelle

  • Photo du rédacteur: Vincent
    Vincent
  • 24 juil. 2017
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 29 déc. 2023


Le tableau a 80 ans cette année. Et il y a 25 ans qu'il fait partie de la collection du Musée Reine Sophie. C'est son trésor le plus cher. Et c'est une des plus belles et bouleversantes œuvres de l'histoire mondiale de l'art.

Pourquoi une commande d'État devient une icône ?

Probablement l'exposition à voir en 2017. Au niveau mondial.

PIEDAD Y TERROR EN PICASSO. EL CAMINO A GUERNICA Piété et terreur chez Picasso. La route de Guernica

Musée Reina Sofia, Madrid, jusqu'au 4 septembre 2017

La pinacothèque madrilène a voulu cette exposition exceptionnelle pour que le public puisse mieux situer Guernica dans son époque, dans l'histoire de l'art et celle de l'Espagne, dans l'œuvre de Picasso. Elle a rassemblé un fonds documentaire inédit (correspondances, photographies de la progression et de l'installation du tableau, documents graphiques et audiovisuels) et une sélection de 180 peintures de Picasso prêtées notamment par le Centre Pompidou (Paris), la Tate Modern (Londres), le MoMA et le Metropolitan Museum (New York), qui permettent d'appréhender la complexité de Guernica.

C'est l'histoire de comment Picasso est finalement arrivé à peindre une œuvre politique, à la demande de la jeune et fragile République, assaillie par les troupes de Franco. Le Gouvernement de Madrid, celui que des forces de gauche avaient réussi à porter au pouvoir de manière démocratique, avait demandé au peintre, installé en France, de réaliser un tableau pour le pavillon espagnol de l'Exposition universelle de Paris. Un monument, qui dénoncerait la Guerre Civile. Picasso avait d'abord répondu non. Il n'était pas sûr de pouvoir offrir à la République ce qu'elle lui demandait. Jusque-là, son œuvre était restée cantonnée à l'intime.


Photo : Joaquin Cortés / Roman Lores

Le défi réussi de rassembler 180 œuvres issues de trente collections privées et musées à travers le monde vaut déjà la visite ! On peut grâce à ces prêts (rarissimes) voir Femme se peignant (MoMA), Nu debout face à la mer (MET), Mandoline et guitare (Guggenheim)... Ces toiles-clés qui nous racontent dans quelles circonstances personnelles et historiques l'artiste a opéré une transformation artistique radicale à partir de la fin des années 1920, pour aboutir à une fresque murale monumentale qui crie toutes les guerres, passées, présentes et à venir.


Pablo Picasso, Mandoline et guitare, 1924, huile et sable sur toile, 140,7 X 200,3, Salomon R. Guggenheim, New York, © Succession Picasso VEGAP 2017

Ce chemin nous montre la métamorphose que vit Picasso, de l'optimisme initial du cubisme à la recherche d'une nouvelle vision du monde, entre beauté et monstruosité, dans la période de convulsion que furent les années trente, marquées par l'ascension de mouvements comme le fascisme et le nazisme, et la Guerre d'Espagne bien sûr.

Une période durant laquelle Picasso, homme mature, artiste consacré mondialement, sera sujet à des crises artistiques, verra naître des mouvements auxquels il ne participera pas, comme le surréalisme de Dalí, Buñuel et Miró, qui partent à la découverte du monde de l'inconscient, des espaces impossibles, des paysages ouverts, contrepoints aux espaces clos du cubisme...

Jusqu'à Guernica, le monde de Picasso avait été fondamentalement personnel. Il était limité par les murs et les fenêtres de son studio...

Guernica ::: Pablo Ruiz Picasso

1937 ::: huile sur toile, 350x777cm ::: Museo Reina Sofía, Madrid

Picasso avait vu les photos du peitit village basque de Guernica après le bombardement intensif par les avions nazis, à la demande de Franco. Un massacre d'une sauvagerie rare. Quand on lui demanda la signification de Guernica, Picasso répondit : "La peinture n'est pas destinée à décorer les appartements. C'est une arme offensive et défensive contre l'ennemi."

Picasso a surveillé le tableau toute sa vie durant. Il n'a autorisé son acquisition par l'Espagne qu'une fois rétablies les libertés démocratiques. Son arrivée à l'aéroport de Madrid, en 1981, a été entourée des soins qu'on apporte aux visites de chefs d'État.

Cette grande fresque a été peinte en noir et blanc, en rappel des clichés de Guernica diffusés dans la presse à la suite des bombardements. Comme un témoignage sur l'horreur de la Guerre Civile espagnole et une prémonition de ce que serait la Deuxième Guerre Mondiale...

Picasso aborde le thème du monument aux morts par la voie civile. Il fait entrer sur la scène publique la douleur et la souffrance des villageois, créant le premier anti-monument, en ce qu'il n'est en rien militaire.

La peinture, qui ne fait pas d'allusion directe au bombardement, est un plaidoyer contre la barbarie, une œuvre pacifiste. Guernica évoque toutes les guerres. C'est une icône culturelle qui délivre un message à l'humanité. Aujourd'hui, Guernica est une référence lorsque l'on parle de génocide, du Salvador au Rwanda. Une copie est accrochée au siège de l'ONU à New York.

Il faut aller voir Guernica au Musée Reine Sophie. C'est un magnifique tableau, bien sûr. Mais plus, la rencontre avec cette œuvre historique est un moment d'émotion. Elle est monumentale (27 mètres carrés), sa sobriété chromatique accentue l'expressivité des sujets. Sa composition, une trame narrative claire, amplifie l'intensité dramatique de chacune des scènes. Guernica absorbe qui s'y consacre.

Allez-y tôt le matin ou avant la fermeture du musée. Parce que la toile la plus connue de Picasso est aussi une vedette...


Photo : Joaquin Cortés / Roman Lores

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